S’il y a bien une chose dont nous étions curieux depuis le début de cette aventure costaricienne, c’était de savoir au bout de combien de temps nos mini surfeurs de 7, 5 et 2 ans sauraient se débrouiller en espagnol, et en combien de temps ils seraient vraiment « presque bilingues ».
Voici l’état des progrès, presque six mois après le début de notre séjour (qui est en fait le 2e), et surtout après trois mois d’école et de garderie, lieu principal où les enfants sont immergé dans un milieu hispanophone.
Tout d’abord, ce qui est évidemment intéressant de constater, c’est que selon leur âge et leur avancée dans la parole et le monde de l’écrit en français, mais aussi sans doute selon leur personnalité propre, ils semblent avoir chacun une façon bien à eux de fonctionner.
Forcément, Nilad, la plus grande, qui est déjà dans le monde de l’écrit (lit depuis plus d’un an) analyse et intellectualise plus l’apprentissage. Elle pose souvent des questions sur le sens de tel ou tel mot qu’elle a entendu à l’école (« Au fait maman, ça vaut dire quoi pizarra ? »), doit écrire et faire des présentations orale en espagnol pour les devoirs scolaires, et apprend d’ailleurs aussi les règles d’écriture de l’espagnol à l’école. Trop simple, l’orthographe en espagnol… pas évident de maintenir la poursuite de l’apprentissage de l’orthographe française avec cela !
La deuxième, du haut de ses cinq ans, n’est pas encore dans l’univers de l’écrit (elle commence juste à apprendre les lettres) mais (et ceci découle sans doute de cela), elle a une mémoire auditive incroyable. Elle chante (sans forcément savoir ce qu’elle dit – et cela lui importe peu ! ) les chansons apprises tant en anglais tantôt en espagnol à l’école. Et d’ailleurs, elle est capable de rechanter les paroles de chansons dans n’importe qu’elle autre langue avec une précision déroutante. On a fait le test, entre elle et moi, qui suis pourtant aguerrie dans le domaine des langues : sur une même chanson dont on ne comprend pas les paroles, elle est celle qui s’en souvient le mieux et avec une assez bonne précision sur l’imitation des sonorités (j’en suis blasée… non je plaisante : D !)
Elle ne pose donc pas de questions sur le sens des mots, de la même façon qu’elle ne raconte pas encore trop ce qu’elle fait à l’école, mais au détour d’une conversation, on se rend compte qu’elle comprend et connait pas mal de vocabulaire ! A sa soeur qui me demandait « Maman, c’est quoi ‘el suelo‘ « , notre Selmagique de répondre : « Ben c’est le sol ! ». Evidemment !…
Quant à notre petit dernier qui, du haut de ses deux ans, ne fait pas encore de phrases complètes en français (du moins ses phrases sont structurées sur le modèle (« moi – aller – plage » ou bien » ‘oiture – casse – ‘parer ! »… vous avez compris ?), ce même petit surfeur en herbe nous ramène des mots pris au hasard de ses virées en milieu hispanophone. Des fois on comprend (« listo« , « gracias« ), des fois on ne comprend rien (ces derniers jours il aime bien dire « kofalaï », c’est mignon mais je ne sais pas du tout ce que ça veut dire, ou encore des enchaînement de sons style « badabodokada »). Pour l’anecdote, il s’est récemment mis à dire « bakamono » quand il se dispute avec ses soeurs (« bakamono » signifie « idiot » en japonais, je n’ai pourtant pas le souvenir de le lui avoir appris, celui-là !!). Hasard ou coïncidence…:) Autre chose, il commence à insérer des mots espagnols dans des « phrases » françaises : « moi – asseoir – aquí » !
En tout cas, nulle doute que plus l’on est jeune, plus l’on apprend une langue avec spontanéité et en fonction du contexte, et non pas en intellectualisant les choses comme nous le faisons plus tard dans la vie.
Voilà, en conclusion, je pense qu’on peut dire que non, nos enfants ne sont pas bilingues au bout de trois mois d’école au Costa Rica (enfin, heureusement, car l’inverse m’aurait presque fait peur !). Mais oui, je pense que l’on peut dire qu’ils se débrouillent dans le sens où ils arrivent plus ou moins à se faire comprendre s’ils sont confrontés à un milieu hispanophone et n’ont plus peur de prendre la parole en espagnol. La plus grande dit avoir encore du mal à nouer des relations avec les élèves uniquement hispanophones de sa classe mais la petite semble être plus à l’aise à ce niveau. Quant au plus jeune, il n’en est même pas vraiment encore au stade de nouer des relations d’amitié tout court, alors…
Les trois ne sont pas encore capables de faire de longues phrases ou de tenir des conversations compliquées mais innovent en essayant d’importer des mots du français en les espagnolisant, râlent de moins en moins quand on les met devant un dessin animé en espagnol (ça c’est un sacré test :D), et s’intéressent de plus en plus aux langues en général. Bref, c’est émouvant, fascinant et source d’inspiration pour nous de les voir évoluer ainsi. On espère, à divers autres niveaux, pouvoir en faire autant. Bon, je vous parlerai dans un prochain épisode de mon propre défi qui consiste à apprendre à faire la roue (on ne se moque pas !) d’ici la fin de l’année scolaire 😀 Hahaha…
Edit : après lecteur de ce blog, notre Captain Kolibui me fait élucider le mystère du « bakamono » : il s’agirait en fait de la contraction de « baga » (« bagarre ») et mono (« singe » en espagnol) ! Quelle trouvaille ! 😀
Formidable cette analyse de la découverte de la langue espagnole par chaque enfant !
Merci !